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QuotaClimat a fact-checké un débat des Européennes 2024

Observations de la cellule de fact-checking du débat des têtes de listes aux élections européennes consacré à la transition écologique et sociale

ChangeNow, 27 mars






Cet article rend compte des inexactitudes factuelles et déformations prononcées lors du débat électoral européen du 27 mars 2024, diffusé sur Franceinfo et la chaîne Youtube de Gaspard G, modéré par Lucie Chaumette et Gaspard G, ayant fait intervenir : 


  • Mathilde Androuet pour le Rassemblement national

  • Clément Beaune pour Renaissance

  • Aurore Lalucq pour le Parti socialiste - Place publique

  • Manon Aubry pour la France Insoumise

  • François-Xavier Bellamy pour Les Républicains

  • Nicolas Bay pour Reconquête

  • Marie Toussaint pour Europe-Écologie Les Verts


La cellule de fact-checking a travaillé en direct du débat, et était composée de : 

  • Eva Morel, présidente de l’association QuotaClimat 

  • Jean Sauvignon, responsable baromètre de l’association QuotaClimat 

  • Maxence Cordiez, expert associé énergie-climat à l’Institut Montaigne

  • William Honvo, professeur d’économie et de finances publiques

  • Hervé Guyomard, directeur de recherche à l’INRAE

  • Guillaume Kerlero de Rosbo, directeur Transition écologique de l’Institut Rousseau

  • Léa Schmieden, chargée de projets média et communication aux Jeunes européens et salarié du Taurillon

  • Thomas Leite, salarié des Jeunes européens et du Taurillon


Le débat peut être re-visionné ici : https://www.youtube.com/watch?v=uQ_VTClMuHs


 

Nicolas Bay a affirmé que le Pacte Vert inflige des normes environnementales aux agriculteurs et des coûts associés.


→ Le Pacte Vert n’est pas encore entré en vigueur, il n’impose donc aucune norme aux agriculteurs à l’heure actuelle.


Manon Aubry a affirmé que 80% de l’argent de la PAC était reversé à 20% des agriculteurs.


→ C’est vrai en Europe, mais moins prononcé en France, où 51% des aides sont versées à 20% des agriculteurs.



Marie Toussaint a affirmé qu’il était nécessaire de déployer un surcroît d’investissement de 10 milliards d’euros en agriculture pour atteindre les objectifs écologiques.


→ L’étude “Road to net zero” de l’Institut Rousseau chiffre le besoin d’investissement à 150 milliards par an en agriculture, dont 50 milliards supplémentaires par rapport aux investissements actuels.



Mathilde Androuet a affirmé que l’Europe devait rompre avec son axiome de la décroissance.


→ L’article 3 du Traité de l’Union européenne dit que “L'Union établit un marché intérieur. Elle œuvre pour le développement durable de l'Europe fondé sur une croissance économique équilibrée et sur la stabilité des prix”.


Il fait de la croissance économique un objectif communautaire. L’Union européenne ne peut donc pas promouvoir la décroissance, cela serait contraire à ses principes directeurs.


Clément Beaune a affirmé que la France était la première puissance agricole exportatrice de l’Union européenne.


→ C’est faux : la France est au troisième rang après les Pays-Bas et l’Allemagne.



Clément Beaune a affirmé que, pour la première fois, des clauses miroirs avaient été obtenues dans le cadre de la négociation de l’accord de libre-échange conclue entre l’Union européenne et la Nouvelle-Zélande.


→ C'est trompeur : des clauses miroirs ont été inscrites, mais elles sont de facto non contraignantes car les parcs d'engraissement n'existent pratiquement pas en Nouvelle-Zélande (feedlots). C’est ce qu’un rapport du Sénat a qualifié de “miroir aux alouettes”, un dispositif consistant à acheter l’acceptabilité d’un accord ne répondant pas aux attentes sanitaires ou environnementales par des clauses vides de sens.



François-Xavier Bellamy a affirmé que le texte “De la Ferme à la Fourchette” du Pacte Vert allait conduire à une diminution de la production alimentaire située entre 10 à 15%.


→ C’est faux : une disposition inscrite dans le texte initial, mais retiré lors du vote, proposait d'instaurer 10% de jachères sur la surface agricole utile européenne - afin de préserver la production et la résilience alimentaire.



François-Xavier Bellamy a affirmé que la France opérait des sur-transpositions de normes agricoles.


→ C’est faux :  la France apparaît même comme l’un des pays autorisant le plus de substances actives (seuls l’Italie, la Grèce et l’Espagne en autorisent davantage). 383 substances actives sont autorisées par l’EFSA et 283 peuvent être commercialisées en France. Un total qui est loin de placer la France dans les pays les plus restrictifs sur la question puisque l’Allemagne n’en autorise que 262. Souvent considérée comme une menace pour les agriculteurs français, la Pologne autorise moins de pesticides que la France (265).



Nicolas Bay a affirmé qu’un accord de libre-échange établissait l’absence de droits de douane.


→ C’est faux. Un accord de libre-échange comprend la diminution des droits de douane dans certains domaines, mais aussi l’ouverture mutuelle de marchés publics ou encore la reconnaissance de normes et d’indications géographiques protégées chez chacun des partenaires.



Nicolas Bay a affirmé que la logique européenne était d’avoir un marché totalement ouvert.


→ C’est faux :  la logique de l’UE n’est pas d’ouvrir totalement le marché, il existe des droits de douane - notamment pour l’agriculture. Par ailleurs, comme mentionné plus haut, les accords de libre-échange protègent certaines normes et indications.


Manon Aubry a affirmé que 100% des Guadeloupéens souffraient de coupures d’eau.


→ C’est faux : 25% des habitants en souffrent de manière régulière.



Manon Aubry a affirmé qu’après 24h sans eau, un humain meure.


→ C’est faux : le corps humain décède après avoir été privé d’eau pendant 3 jours en moyenne.



Nicolas Bay a affirmé qu’il y avait 550 000 habitants à Mayotte pour un territoire dimensionné pour 250 000 habitants, et qu'il y avait 300 000 clandestins.


→ C’est faux : il y a 300 000 habitants recensés à Mayotte, et une estimation de 50 000 clandestins sur place.



Marie Toussaint a affirmé que le coût de la dépollution de l’eau du robinet en France, pour en extraire les pesticides et les nitrates, est de 800 milliards d’euros.


→ C’est plus compliqué. Le coût estimé du traitement pour rendre l’eau potable est compris entre 500 millions et 1 milliard d’euros par an - non-spécifique aux pesticides et nitrates.


Par contre, le coût minimal qu’engendrerait une dépollution des eaux souterraines est lui situé entre 500 et 800 milliards au total.


Sources : 



Aurore Lalucq a affirmé que son groupe faisait partie de ceux qui n’ont jamais soutenu le projet Nord Stream.


→ C’est partiellement faux : les socialistes allemands ont soutenu le projet Nord Stream.


Source : 


Clément Beaune a affirmé que la France détient le mix énergétique le plus décarboné d’Europe.


→ C’est inexact, la France se situe derrière la Suède.



Marie Toussaint a affirmé que l’Allemagne avait diminué ses émissions de 10% en 2023. 


→ C’est vrai mais cette baisse a été attribuée à la récession économique subie par le pays (-0,3% de PIB sur l’année passée) plutôt qu’à l’amorçage d’une transition écologique ambitieuse.



François-Xavier Bellamy a affirmé que l'Allemagne avait augmenté son recours au charbon entre 2022 et 2023.


→ C'est faux : c'est l'inverse, l'Allemagne a réduit son recours au charbon en 2023 par rapport à l'année passée. La part du charbon dans la production d'électricité allemande est passée de 34% en 2022 à 26% en 2023.



Mathilde Androuet a affirmé que la France avait presque déjà fini sa transition énergétique.


→ C’est faux : le Haut conseil pour le climat affirme, dans son dernier rapport annuel, que la France ne possède pas un rythme de décarbonation lui permettant d’atteindre ses objectifs à horizon 2030.



Mathilde Androuet a affirmé que nous pourrions interroger le bilan carbone de la production de solaire ou d'éolien lorsque ces énergies sont produites en Chine.


→ La réponse est claire : l'impact carbone des renouvelables reste meilleur même lorsque les panneaux solaires et les éoliennes sont produits en Chine. L'ADEME évalue l’empreinte carbone du photovoltaïque à : 

  • 43,9 g CO2eq/kWh pour les panneaux chinois

  • 32,3 gCO2eq/kWh pour les panneaux européens

  • 25,2 gCO2eq/kWh pour les panneaux français


Pour l'éolien, l'empreinte carbone moyenne est de :

  • 14,1 g CO2 eq / kWh pour les éoliennes terrestres

  • 15,6 g CO2 eq / kWh pour les éoliennes en mer


Pour les énergies fossiles, ce chiffre monte beaucoup plus haut :

  • 820 g CO2eq/kWh pour le charbon

  • 600 g CO2eq/kWh pour le pétrole

  • 490 g CO2eq/kWh pour le gaz


Le bilan carbone reste donc meilleur pour les renouvelables.




Mathilde Androuet a affirmé que réduire de 50% nos émissions d’ici 2050 conduirait à un effondrement social.


→ C’est faux : la Stratégie nationale bas carbone mise en grande partie sur l’efficacité énergétique (services inchangés consommant moins, notamment via l’isolation des bâtiments et la mobilité électrique) pour réduire de 40% les émissions nationales d’ici 2050. 


Mathilde Androuet a affirmé que la Chine ouvrait 2 centrales à thorium pour miser sur le nucléaire.


→ C’est faux, elle n’en a ouvert qu’une seule.



Nicolas Bay a affirmé que la voiture électrique n’était pas un modèle d’avenir car il crée une dépendance aux terres rares.


→ Pas nécessairement : tous les véhicules électriques n'intègrent pas de terres rares dans leurs chaînes de traction. Si certains constructeurs ont opté pour des moteurs électriques à aimants permanents (intégrant des terres rares), d'autres ont opté pour des électroaimants qui n'en contiennent pas. Les véhicules électriques ont un bilan carbone près de 4 fois meilleur que leur équivalent thermique.



Nicolas Bay a affirmé que la voiture à hydrogène est un investissement stratégique.


→ C’est faux : la voiture à hydrogène est très peu efficace et a été globalement abandonnée par l’industrie. En outre, la disponibilité de l’hydrogène serait durablement contraignante (il faut le produire avec de l’électricité bas carbone, avec des pertes).



Manon Aubry a affirmé que son groupe est le seul à s’être opposé à l’extension du marché carbone du fait de son caractère socialement injuste.


→ C’est à nuancer :  au niveau des groupes européens, le groupe The Left est effectivement le seul à avoir majoritairement rejeté le texte. Cependant, si l’on s’intéresse aux délégations de députés français, les députés écologistes français ont en très grande partie voté contre le texte, au même titre que les députés Français Insoumis.


Sources : 



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